L’effet réel d’une cotisation REER

PAR- MICHAËL LECLERC

Des sceptiques ? Ce phénomène s’explique pourtant assez facilement.

Le premier effet d’une cotisation REER, et qui est d’ailleurs connu de tous, est la déduction fiscale qu’elle procure. La cotisation permet aux particuliers de réduire leur revenu net et de profiter d’une première économie d’impôt équivalent grossièrement à leur taux d’imposition marginal multiplié par la cotisation versée.

Le deuxième effet d’une cotisation REER, très souvent négligé, est la bonification des mesures sociofiscales. Il faut savoir que le système fiscal canadien est structuré de façon à ce que les ménages à plus faible revenu bénéficient davantage de prestations et de crédits afin de réduire les écarts de richesse. Comme mentionné précédemment, la cotisation permet de réduire le revenu net et c’est sur ce même revenu que sont calculés de nombreuses allocations et nombreux crédits d’impôt offerts par nos gouvernements. Ainsi, lorsqu’on cotise à un REER et, par le fait même, qu’on réduit sur papier le revenu net du ménage, il est possible d’observer, entre autres, les changements fiscaux suivants :

Augmentation de l’allocation canadienne pour enfants (ACE) ;

Augmentation du paiement de Soutien aux enfants (SE) ;

Admissibilité (potentielle) au crédit pour la TPS ;

Admissibilité (potentielle) au crédit d’impôt pour solidarité.

Afin de mieux illustrer nos propos, nous décrirons le cas d’un couple ayant la situation financière suivante :

Salaire de monsieur : 42 000 $ ;

Salaire de madame : 28 000 $ ;

Deux enfants (un seul de moins de six ans) ;

Frais de garde : 9 000 $/an dans une garderie non subventionnée ;

Le couple décide en février 2018 d’utiliser la marge de crédit hypothécaire pour verser une cotisation REER de 25 000 $ applicable à l’encontre de son revenu net de 2017.

Chacun a suffisamment de droits de cotisation REER non utilisés et la cotisation sera répartie optimalement entre les deux conjoints.

Le couple a la capacité financière de régler l’emprunt supplémentaire.

En faisant une cotisation REER de 25 000 $, le couple bénéficiera d’abord d’une déduction fiscale lui procurant une économie d’impôt de 7 645 $, correspondant au premier effet décrit précédemment. Si notre analyse s’arrêtait ici, la pertinence de cette cotisation REER pourrait, selon le cas, être discutable.

Toutefois, en prenant en considération le deuxième effet de celle-ci, il serait judicieux de sauter sur l’occasion. En effet, la réduction du revenu familial de 25 000 $ entraînera également les changements fiscaux suivants :

L’ACE passe de 7 615 $ à 10 990 $ (augmentation de 3 375 $) ;

Le SE passe de 2 820 $ à 3 612 $ (augmentation de 792 $) ;

Le crédit pour la TPS passe de 0 $ à 854 $ ;

Le crédit d’impôt pour solidarité passe de 0 $ à 616 $.

Total des mesures sociofiscales supplémentaires pour le couple : 5 637 $

En additionnant l’économie d’impôt sur le revenu (effet 1) et les gains encourus du côté des mesures sociofiscales (effet 2), on constate que les 25 000 $ de cotisation REER donnent droit théoriquement à des encaissements de 13 282 $, soit un rendement de l’investissement de 53,13 %. À l’aide de ces encaissements, le couple pourrait, entre autres, utiliser les sommes perçues pour rembourser partiellement l’emprunt ou encore pour réaliser de l’épargne additionnelle.

Il faut noter que les irrégularités fiscales du genre sont principalement observées chez les ménages à faible revenu, mais on peut quand même en voir à l’occasion chez les mieux nantis.

Pour en connaître davantage sur le sujet, je vous invite à consulter les courbes de Claude Laferrière sur le site du Centre québécois de formation en fiscalité (CQFF) http://bit.ly/2ywgpBQ, qui illustrent de façon éloquente ces aberrations fiscales.